Au-delà du dépit qu'il exprime, le texte souligne une réalité économique : il y a pénurie de repreneurs. Les successions de père en fils ne coulent plus de source, la génération montante préférant suivre d'autres destinées professionnelles, et les investisseurs extérieurs au secteur, qui rechercheraient dans l'acquisition d'une entreprise de transport un effet de levier, ne se bousculent pas. Les motifs de reprise s'appuient plus sur des choix opérationnels (acquisition de plates-formes, économies d'échelles, accès à de nouveaux trafics...) que des opportunités financières, la rentabilité nette sur fonds propres étant souvent faible. Par surcroît, l'ouverture des frontières à la concurrence étrangère, les discours politiques peu favorables aux camions, les contraintes administratives nombreuses et taxes diverses... n'incitent pas à se risquer. Résultat : l'absence de repreneurs entraîne un préjudice. Faute de candidats -qui font mécaniquement monter les enchères-, des entreprises de transport sont moins bien valorisées, pénalisées par la loi de l'offre et de la demande. Leur prix réel, quand les clients sont volatiles et les contrats mal ficelés, se limite parfois à la seule valeur du matériel roulant (quand celui-ci n'est pas, tout ou partie, sous contrat de location financière). Des artisans et patrons de pme, qui avaient misé sur la vente de leur entreprise pour s'assurer une retraite paisible, voient leur capital de fin de vie en danger. Et la perspective fait tousser... La récente loi pour l'initiative économique, qui contient des allégements fiscaux pour favoriser les transmissions d'entreprises, va-t-elle amortir le choc ? Elle n'aura de portée, dans notre secteur, que pour les entreprises se donnant des stratégies claires consolidées par un mode de gestion précis.
Editorial
