Les fêtes de fin d’année n’ont pas été joyeuses pour tout le monde. Prenez le secteur de la messagerie qui doit digérer la lourde décision de l’Autorité de la concurrence, rendue le 17 décembre, et les 672 M€ d’amendes cumulés. Quel parpaing dans l’estomac de ceux qui défendent les couleurs des 16 entreprises sanctionnées (hors les groupes Mory, Mory Ducros, Sernam et Transports Peronnet, disparus depuis lors) ! Il y a fort à parier que des recours seront déposés, avant le 21 janvier, en reprenant les fondements du droit de la concurrence. Car en l’état, il n’est pas certain que le secteur, qui fait travailler des milliers de sous-traitants en urbain et interurbain, puisse absorber cette avanie d’une ampleur qui laisse songeur. En termes d’images, cette affaire judiciaire, pointant du doigt une « entente secrète » et un « objectif anticoncurrentiel » organisés sous le toit de TLF (elle-même condamnée), n’est guère reluisante, même si la période incriminée date de 2004 à 2010 pour une valeur des ventes affectées de 4 milliards par an. Au plan économique, le jugement est aussi désastreux. Les montants des amendes parlent d’eux-mêmes, de plusieurs dizaines de millions pour neuf entreprises. Au cas par cas, dans les états majors (maison mère ou filiale), la décision de l’Autorité de la concurrence va imposer de sévères révisions. Stratégiques, commerciales ou liées au mode de production, elles devront mettre les coûts en face des revenus. Comment des entreprises qui génèrent des pertes financières récurrentes depuis des années peuvent-elles, en 2016, continuer de faire comme si de rien n’était ? À l’étranger, chez Schenker, Dachser, Ziegler, GLS, DHL, Fedex, TNT Express, le cas français sera désormais regardé sous un angle différent. Au plan général, sur un marché hexagonal dont la géographie des territoires n’aide pas à la rentabilité du plan de transport, la remise en cause s’annonce inévitable. Depuis des lustres, le secteur de la messagerie est surcapacitaire et s’en plaint. Trop concurrentiel, trop acharné, trop moins-disant, répètent les opérateurs. Peut-être que la décision historique de l’Autorité, en servant d’avertissement dans le monde du transport, poussera à la concentration des moyens et… à une diminution du nombre d’opérateurs et de réseaux. Pas sûr que les clients de la messagerie en France, que l’Autorité de la concurrence veut défendre, s’en porteront mieux.
Éditorial