Le décret n° 2016/418, paru au JO du 9 avril, suffira-t-il à mettre de l’ordre dans les pratiques du cabotage ? Il est permis d’en douter. Mais on ne peut nier qu’il mettra un supplément de pression sur les opérateurs de transport, les donneurs d’ordre et… les destinataires, à partir du 1er juillet. Rappelons l’objet du décret : les entreprises de transport basées hors de France, détachant des conducteurs dans l’Hexagone, devront tenir compte de notre Code du travail et de son salaire horaire minimum. Sont dans le viseur tous les personnels roulants et navigants en France : Polonais, Roumains, Espagnols… Ainsi, le décret met en pratique les règles du droit du détachement pour les transports terrestres dans le double objectif d’« aider à protéger les travailleurs détachés et à assurer le bon fonctionnement du marché ». Avec trois points à retenir : apparition d’une « attestation de détachement » d’une durée de validité maximale de six mois, pouvant couvrir des détachements successifs ; obligation pour le salarié détaché de pouvoir présenter, à tous moments, l’attestation de détachement et le contrat de travail, forcément conservés à bord du véhicule ; implication du destinataire, partie au contrat de transport, contraint aux mêmes obligations de vigilance et responsabilités que le donneur d’ordre. Ainsi, le destinataire de la prestation de transport devra, lorsqu’il est la seule partie établie en France, alerter les agents de contrôle des éventuelles irrégularités préjudiciables au salarié : non-paiement du salaire minimum ou conditions de vie indignes. Avec bonhomie, le secrétaire d’État en charge des Transports, Alain Vidalies, pourra expliquer les grands principes du nouveau décret à ses collègues européens lors de la réunion des ministres des Transports à Amsterdam, les 14 et 15 avril. Mais, il ne pourra pas convaincre les professionnels du transport routier que ce texte résout le problème. Car le décret arrive dans un marché du TRM déstabilisé par la concurrence des transporteurs low cost, les affrètements « sauvages », le prêt illégal de main-d’œuvre, le repos hors cabine non respecté, le cabotage sans bornes… Des maux maintes fois dénoncés. Ils ne disparaîtront pas sans l’exécution et la publicité, à l’échelle de la fraude, des sanctions pénales et administratives prévues par le décret.
Éditorial